dimanche 15 janvier 2012

Le jour le plus déprimant

Demain 16 janvier correspondra au Blue Monday, le jour le plus déprimant de l'année selon un calcul pseudoscientifique élaboré il y a déjà quelques années. Ce creux annuel de la déprime a été identifié à l'origine par la complexe et divertissante équation d'un psychologue anglais à la solde d'une compagnie de voyage qui convoitait ainsi de voir la déprime de janvier associée à une irrésistible envie des consommateurs d'aller se requinquer sous des cieux ensoleillés.

De nos jours, la formule a survécu et s'est généralisée à la culture populaire, de sorte que les médias vont encore cette année nous abreuver de cette nouvelle comme s'il s'agissait d'un fait scientifique et nous expliquer que notre déprime est justifiée, voire qu'elle est la norme!

Or, cette déprime saisonnière n'est pas un passage obligé, mais force est de constater que la culture ambiante tant à l'encourager. Un exemple : hier, de passage aux Promenades Drummondville, j'ai pu constater évidemment que le Père Noël avait levé les feutres du mail central, ramenant avec lui son décor, ses lutines motivées (Hehe! Voir http://lecentricois.blogspot.com/2011/12/libre-service-chez-le-pere-noel-des.html) et les poteaux de sa file d'attente. Pour être remplacer par quoi? Par le vide et quatre véhicules Chevrolet et GMC en démonstration du garage Montplaisir!

Bonjour la joie!

Ici, ne vous méprenez pas. Ce n'est pas que j'en aie contre les expositions de chars - c'est sans aucun intérêt certes - mais vous conviendrez que c'est moins festif comme démonstration. En fait, n'importe quel produit présenté dans ce même décor complètement dépouillé de janvier aurait été tout aussi déprimant.

D'ailleurs, pensez-y : on commence au mois de novembre à bâtir cette escalade de joie, de partage, de bonheur tous azimuts qui culminera avec les fêtes de Noël et du Jour de l'An et, rapidement début janvier, on range toutes les décorations et notre environnement passe au gris; on cherche de l'espace de rangement pour caser les cadeaux accumulés en décembre pendant que le solde de nos cartes de crédit vient nous rappeler dès janvier que l'hiver va être long; on évince sans ménagement le bon Père Noël des centres commerciaux pour le remplacer au plus vite par des Chevrolet, etc. Et après ça, on se demande pourquoi les gens sont déprimés en janvier!

Cette déprime saisonnière, elle est en grande partie la conséquence de nos propres choix individuels et collectifs. Le froid de janvier et les longues nuits hivernales qui durent y sont certes pour quelque chose dans cette tendance à la déprime, mais entre vous et moi, ce qui rend janvier si triste, c'est notre culture qui en fait un gros lendemain de veille marqué par une frugalité extrême et bien mise en évidence, comme pour nous rappeler que la vie ne peut pas toujours être joyeuse...

Dites-moi, est-ce que janvier vous semblerait aussi pénible si, en mettant les pieds aux Promenades Drummondville, vous constatiez que le Royaume du Père Noël avait cédé sa place à un concept moins grisâtre? Si, lors de votre passage au centre commercial en janvier, vous y étiez accueilli par une prestation en direct de bongo ou de castagnettes à l'ombre d'une palapa et de palmiers (même en plastique), vous ne ressentiriez à coup sûr aucune déprime. Ce Blue Monday, quand vous en entendrez parler encore cette année, dites-vous qu'il fait jaser uniquement parce que notre culture en nourrit l'existence.

Mais, rassurez-vous, il n'existe pas vraiment : il n'est là que pour donner une justification aux airs bêtes que vous croiserez demain et auxquels vous sourirez pour leur rappeler que le soleil brille toujours, même en janvier...

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